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Pouchkine est mort en laissant à sa femme Nathalie Gontcharova et leur quatre enfants, des dettes colossales, de tous genres. Le poète a vécu au dessus de ses moyens.
Ses enfants qui l’adoraient ( surtout sa fille ainée Maria), ont connu des fortunes différentes et sont, pour la plupart, morts prématurément.
Oui ! C’est aussi ça, très souvent, le destin des « grands hommes ». Ça nous fait un peu penser à un monument de notre histoire culturelle et politique : Léopold Sédar Senghor. Lui n’est pas mort pauvre mais le sort de ses trois enfants est dramatique.
C’est Dieu qui décide.
Pouchkine, comme Senghor, auront transmis à la postérité des écrits qui ont marqué le monde des lettres. Ce sont deux « contemporains » qui ont vécu à des périodes différentes (Pouchkine 1799-1837, Senghor 1906-2001) et qui se sont rejoints dans l’esprit d’une idéologie ou d’une certaine attitude au vocable surprenant, puisque nouveau dans la langue française de l’époque, de Négritude.
Senghor et ses amis Césaire, Damas et d’autres encore, en étaient les inventeurs. Il s’agissait, pour eux, de réhabiliter l’image de l’homme noir et de lui redonner ses lettres de noblesse.
Ont-ils réussi leur mission ? L’Histoire nous le dira peut-être plus tard, si ce n’est déjà fait.
Il faut retenir que dans cette volonté de démontrer l’existence et (même !) une certaine primauté des civilisations noires niée par les idéologues de l’hégémonie colonialiste, Pouchkine le Russe a été d’un grand apport. Lui qui était fier de ses origines africaines qu’il savait issues d’ un grand-père qui s’appelle Ossip, lui même fils d’Abraham Hannibal, clamait partout son amour d’une région qui s’appelle Afrique et où il rêvait de séjourner un jour…Il y a séjourné finalement à travers les lignes d’un roman inachevé qu’il a consacré à l’aïeul, intitulé « Arap Pétra »…
C’est ce créateur, ce fondateur reconnu de ce qui est appelé « langue littéraire russe » ( eh oui !) ou plutôt son génie, qui a poussé Senghor, l’autre poète devenu, entre temps, Président de la République, à introduire l’enseignement de la langue russe dans le système éducatif sénégalais ( dans les lycées plus exactement).
Le russe est encore étudié au Sénégal par un nombre qui a, semble t-il, atteint la barre des 10.000 apprenants ! ( j’ai bien écrit « semble t-il »).
Quel bel exemple de porosité historique et culturelle qui a permis d’unir des mondes si éloignés géographiquement mais qui sont, au fond, si près l’un de l’autre grâce à la magie du Mot !
En ce 225 anniversaire du descendant d’Abraham Hannibal, de l’Africain le plus célèbre de Russie, nous avons voulu marquer le moment par une évocation des liens entre Pouchkine et l’intelligentsia africaine à travers l’un de ses plus célèbres enfants : Senghor.

Moscou ce 06 juin 2024

Dr. Souleymane Anta Ndiaye
Diplômé de l’Institut Pouchkine de Moscou.