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Zo, je m’interdis de pleurer Par Boly BAH

Douloureux réveil, Soro. Avalanche de notifications : «le journaliste Soro Diop n’est plus», je fronce et rouvre mes yeux… Soro, non… Je ferme les yeux pour mieux les ouvrir et d’autres notifications le confirment, hélas! Les images défilent dans ma tête, le cœur lourd mais le sourire aux lèvres. Je souris et souris encore, je revois ton visage solaire, j’entends encore ton rire joyeux. J’entends encore et encore tes éclats de rires dans les couloirs du Quotidien. Je vis dans le passé-présent. Le cœur toujours en larmes, je m’interdis la tristesse. Mea-culpa Zo, je sais que tu n’aimais pas les interdits, chez toi c’est plutôt «il est interdit d’interdire». Chez Soro, tout est permis! Son bureau, de la Sodida à Yoff, c’était bonne ambiance et bonne humeur. Un espace de liberté, d’apprentissage, de discussions et de fous rires. Oui Zo, c’est cette image que je retiens de mes premiers jours au Quotidien en septembre 2004. Le desk politique attenant à la salle de conférence de la rédaction du Quotidien de la Sodida pouvait être étouffant, étroit, mais refusait souvent des stagiaires…

Tous venaient pour les Minerves. Tu incarnais à merveille l’esprit «les fous du Quotidien»

Soro, tu étais un grand défenseur des stagiaires, un défenseur de la liberté de presse. Un défenseur de la démocratie et de liberté tout court. Tu refusais l’injustice et te battais pour le respect de la presse et des journalistes. Soro, ta dernière contribution en est la preuve. Tu refusais le terrorisme intellectuel. Tu laisses ainsi un viatique, legs et héritage à la profession. Je me rappelle cette journée noire de la presse d’octobre 2005, la fermeture de Sud Fm suite à l’interview de Salif Sadio. Un de mes rares articles en politique à l’époque, qui me marque encore, c’est le spécial sur la fermeture de Sud quand Ousmane Ngom envoya la police tôt le matin, fermer et arrêter l’équipe de Sud Matin, suite à une interview de Salif Sadio. C’est le branle-bas dans la rédaction. Face au forfait du pouvoir libéral contre la presse, la rédaction était sens dessus dessous. Beaucoup avaient passé la journée à la Dic, tous emportés par le désir de la défense de la liberté d’expression, optèrent pour un spécial Sud. Je devais faire le profil de Ousmane, mon Dieu, je tremble encore de l’audace de mon texte  : «Ousmane Ngom, le poulet du roi récidive.» Je me souviens encore de ton rire, à la fois espiègle et encourageant. Ce rire de respect aussi, tu n’avais à aucun moment émis le désir de changer ou de diluer le texte enragé où ma fougue de jeune reporter revendiquait le respect du droit à l’information. Sur le coup, je n’avais pas évalué le sens des mots. Pourtant que de fois, tu as alerté sur le ton «Hahahha Boly, la Dic va venir te cueillir, tu as vu ton titre ? Chaque mot te vaut la prison. Poulet! Roi et récidive…» Grand éclat de rire. «Bolyyy, la Dic va sonner chez toi de bonheur», me répètes-tu encore au moment où je quittais le journal sous un grand éclat de rire. Dans ton regard, je lisais à la fois du respect et de la fierté. Pendant des jours, mon surnom était  : l’amie de Ousmane Ngom. Je passe sur tous ces surnoms que tu me collais encore… rires. Hors rédaction, tu restais cet homme taquin et généreux. Loin des rédactions, la cordialité, le respect, les fous rires et les surnoms ont toujours marqué nos retrouvailles. Toujours disponible pour un coup de main, un contact, un conseil. Zo, tu étais un rassembleur, je me souviens de l’effervescence aux balcons de Yoff et de la Sodida… Ce samedi encore, j’ai revu des personnes que j’avais perdues de vue depuis presque 10 ans. Retrouvailles certes douloureuses, mais empreintes d’amour et de dignité. Nous étions venus te dire au-revoir. Nous étions là aussi pour te dire  : «Merci pour ton enseignement, ton esprit libre, ta joie de vivre. Merci.» Repose en paix, grand Zo. A jamais dans nos cœurs.