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Concertation sur la vie chère : L’outil portuaire entre les mains d’un manager «dilettante» Par Moustapha DIAKHATE

Avant-hier, le 26 septembre, au Palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor à Dakar, nous avons eu enfin la tenue des assises et concertations sur la vie chère dans la solennité républicaine, avec un Président qui a tendu le micro à tout le monde. C’est un geste à saluer dans le fond. Dans la forme et le timing, je crois qu’un jour commémorant une tragédie collective et  nationale  comme Le Joola n’est pas du tout indiqué pour la tenue d’une telle concertation, aussi importante et aussi urgente soit-elle. A mon avis, tant que les responsabilités ne seront pas situées, tant qu’une seule victime restera au fond des eaux ou dans les cales de l’épave du bateau  non encore remorqué, le deuil du bateau Le Joola sera toujours là. La concertation au palais de la République sonne comme une restitution implacable sur nos programmes et politiques publics. Avant-hier, nous avons entendu commerçants, industriels, producteurs et consommateurs étaler griefs et critiques, et de  bonnes propositions pour certains devant un président de la République attentif et un Premier ministre systématiquement  dans la prise de notes. Je reste convaincu cependant que tant que les choix économiques  ne sont pas tournés vers la production de biens de substitution d’importations, notre pays sera toujours vulnérable aux chocs et crises exogènes qui exposent nos populations à la faim et la baisse drastique de leurs revenus ou pouvoir d’achat.  Cette vulnérabilité nourrit  le trésorier de l’Etat qui dépend pour 70% des recettes douanières reçues sur les importations, estimées à  vingt millions de tonnes chaque année -en  agrégation du fret malien qui transite par le Port de Dakar. Justement le Port de Dakar ainsi est un déflateur -pour ne pas dire un ajusteur- conjoncturel pour les importateurs et le consommateur final. Malheureusement, avant-hier, suite aux nombreuses critiques sur les tarifs douaniers, les lenteurs aux ports, les facturations abusives et souvent opaques des manutentionnaires, la logistique portuaire et l’optimisation des quais et terre-pleins, le président de la République a eu le bon réflexe de tendre le micro au Directeur général du Port pour des réponses et éclaircissements. Dans un langage hésitant avec un ton peu tranchant, le Directeur général, qui doit nous rassurer sur sa gestion d’un outil essentiel pour l’économie, un poumon essentiel pour la chaîne transport-logistique-distribution et consommation, s’est tout simplement esquivé en accusant les manutentionnaires d’être les principaux responsables des lenteurs de tous ordres au Port de Dakar. Il affirme -et je le conteste vaillamment- que le port qu’il dirige ne contrôle que 4% de montants de tarifications supportés par le chargeur ou autre importateur. Quelle fuite en avant !!!!

Comble de la fuite de responsabilité, en effet qui définit le cahier des charges des manutentionnaires, qui contrôle, régit et régule l’activité du manutentionnaire dans l’enceinte portuaire, qui soumet le manutentionnaire à une obligation de performance incluse dans le cahier des charges ?

Le Dg  détient tous les moyens juridiques lui permettant d’agir et de contraindre tout acteur ou  partie prenante dans la chaîne portuaire, à s’aligner sur les directives de l’Etat et sa politique.  Il agit au nom de l’Etat pour le compte de l’économie sénégalaise. Et pourtant au début de l’alternance de 2012, Il était loisible de remettre sur table tout ce que l’ex-régime avait signé avec les différentes concessions au port, surtout celles françaises et émiraties. Malheureusement, ce ne fut pas le cas, voulant coûte que coûte  recouper les investissements consentis, les manutentionnaires qui ont peu investi dans la chaîne logistique surfacturent à tout-va et c’est le consommateur qui paie tout ça, car tout est répercuté  par le chargeur et l’importateur sur le prix final payé par le consommateur. Dpw, Bolloré, Sea Invest, etc., opèrent comme ils veulent et l’entendent. Seuls les opérateurs sénégalais, souvent confinés dans le vrac -très peu lucratif-, travaillent à rationaliser leur facturation du fait de la nature de leurs activités  : le pondéreux. Encore plus décevante fut la réponse du Dg sur  insistance du président de la République, qui lui posa une question sur  les perspectives du port pour faciliter le transport -logistiquement, l’embarquement, débarquement-, là aussi c’est toujours la même litanie chez les autorités de ce pays qui nous font toujours croire que la solution est toujours extérieure, en effet le Dg du Port attend les Japonais avec la Jica pour augmenter les quais fonctionnels. Seulement, dans le contexte d’importation record de riz et blé ou se trouve le terminal céréalier, c’est-à-dire le domaine portuaire dédié au  riz et blé etc., surtout que le  domaine du Pad sous douane est de 163 ha. La congestion au Port de Dakar est surtout une problématique de défaillance managériale et de sous-investissement sur la logistique portuaire globale. Qu’a-t-on vraiment réalisé avec la manne engloutie par l’ex-régime sur le projet du  port du futur et  avec l’actuel régime sur les emprunts obligataires du Pad ? Au regard des difficultés de tous ordres au port, le top manager a-t-il vraiment une feuille de route, en attendant le port en eau profonde de Ndayanne ? Dans tous les cas, Ndayanne ne sera pas la panacée tant que les navires viendront à Dakar pleins de conteneurs et repartiront vides faute de produits d’importation. A la place de Ndayanne, j’aurais opté pour un port de transbordement sur Lompoul et affecté les jolies plages ensoleillées de la Petite-Côte  pour l’aménagement touristique plus résilient écologiquement et plus riche en emplois pour nos jeunes. Aujourd’hui, il nous faut un  indice des prix de l’entreposage, y compris des coûts et charges de manutention, comme un indicateur pour mieux surveiller les concessionnaires. L’actuel Dg issu du milieu de la statistique devrait le mettre en œuvre facilement, c’est ma suggestion.Moustapha DIAKHATE , Expert et Consultant en Infrastructures