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Le processus du parrainage comme filtre pour réduire la pléthore de candidats à la candidature a soulevé un grand débat sur la pertinence et la fiabilité en tant qu’instrument électoral de régulation sur les critères de recevabilité de candidature.
En effet cette situation était prévisible dans la mesure où les réformes sur le parrainage n’ont pas
été faites en profondeur mais plutôt, elles ont été réalisées de façon superficielle, pour ne pas dire politicienne.
Pour rappel, Dans son arrêt de 32 pages rendu le 28 avril, la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) porte un coup sévère au code électoral sénégalais, qui avait consacré, en février 2019, la réélection du président Macky Sall dès le premier tour, au milieu d’un désert de candidatures concurrentes. « La Cour décide que les formations politiques et les citoyens du Sénégal qui ne peuvent se présenter aux élections du fait de la modification de la loi électorale [en 2018] doivent être rétablis dans leurs droits par la suppression du système de parrainage, qui constitue un véritable obstacle à la liberté et au secret de l’exercice du droit de vote, d’une part, et une sérieuse atteinte au droit de participer aux élections en tant que candidat, d’autre part. »
En outre, si nous sommes d’accord qu’il n’y a pas de liberté sans lois, alors nous considérons aussi que les lois morales ou juridiques non seulement n’excluent pas la notion de liberté, mais sont en outre nécessaires pour qu’advienne une liberté authentique.
Or dans ce processus de parrainage le libre choix du citoyen est compromis dans la mesure où n’importe quel citoyen, à cause d’un tirage au sort, peut voir son candidat se retrouver en dernière position donc avec moins de chance de passer à ce test de parrainage.
A cette situation anti-démocratique, il faut y ajouter le fait que le candidat ne puisse changer de type de parrainage en cas de premier rejet. Par conséquent le citoyen dans ce cas de figure, risque de ne pas voter puisque le système a limité ses choix, cela constitue une violation du droit de vote. Nous rappelons que voter est un droit, c’est un acte citoyen qui permet de choisir son(sa) ou ses représentants à l’occasion d’un scrutin. Au sein d’une démocratie, ce droit
fondamental de participation permet d’exercer sa citoyenneté en participant à l’élection de son(sa) ou ses représentants.
L’inhérence des élections à la démocratie est du reste clairement affirmé par la Déclaration universelle des droits de l’homme :
« La volonté du peuple est le fondement de l’autorité des pouvoirs publics ; cette volonté doit s’exprimer par des élections honnêtes, libres, transparentes, inclusives qui doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure assurant la liberté du vote »
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Selon certains penseurs modernes du gouvernement représentatif, la désignation des gouvernants par une élection avait un caractère aristocratique : elle était destinée à sélectionner les meilleurs pour gouverner. C’est ainsi que, au début du XIX eme siècle, François Guizot pouvait encore écrire : « Le but de l’élection est évidemment d’envoyer au centre de l’État les hommes les plus capables et les plus accrédités du pays ; c’est une manière de découvrir mais aussi de constituer la véritable et la légitime aristocratie »
L’ère de cette aristocratie est dépassée certes mais dans une vraie démocratie, la légitimité reste fondamentale. Qui doit posséder le pouvoir de prendre les décisions politiques au nom du ‘dèmos’, le pouvoir de gouverner ? Comment désigner et contrôler ceux qui auront ce pouvoir ? Nous sommes XVIII millions, mais combien de sénégalais auront le privilège de choisir le prochain président de la République ?
Même si Alexis de Tocqueville soulignait que l’égalité politique est au cœur de la démocratie et
implique le suffrage universel. Il faut reconnaitre aussi que la démocratie suppose avant toute chose des élections libres, mais de plus en plus il paraît cependant remis en question c’est pourquoi on parle de « la crise de la représentation ». Celle-ci est avant tout, une crise de la force légitimant l’élection.
Aujourd’hui, nous nous rendons compte que de plus en plus, l’élection au suffrage universel n’est plus vraiment inclusive, non pas seulement à cause de subterfuges politico-judiciaires pouvant retenir des candidats, mais encore trois autres raisons sont souvent avancées :
a) de facto, la participation électorale est socialement biaisée : les citoyens plus scolarisés et issus de milieux plus favorisés votent davantage que ceux qui sont moins scolarisés et issus de milieux moins favorisés ;
b) le même biais social affecte, de manière encore plus marquée, l’accès aux mandats politiques : la grande majorité des élus ont un niveau de revenu et un niveau d’études supérieurs à la moyenne des citoyens ; ils ont souvent fréquenté les mêmes écoles, les mêmes cercles et sont parfois issus des mêmes familles ;
c) enfin, la dynamique électorale conduit à une professionnalisation de la politique, à la constitution d’une « classe politique » dotée d’un certain pouvoir social et dont les intérêts et le mode de vie se distinguent de ceux du reste de la population.
Par ailleurs une réflexion sur la légitimité démocratique ne peut en effet se focaliser exclusivement sur les conditions d’un rapport dialogique entre citoyens au sein d’un espace public ou d’une instance de délibération. Elle doit aussi penser à la phase consensuelle du processus qui constitue une base de confiance entre les acteurs.
C’est pourquoi nous devons aujourd’hui nous assurer durant la prochaine élection que notre futur Président ne souffre d’aucune légitimité et qu’il soit crédible aux yeux des sénégalais pour
conduire en toute sérénité les destinées de notre cher pays.
Pour ce faire le Conseil Constitutionnel a un grand rôle à jouer pour que le droit soit objectivement lu, tous les recours traités selon les délais du code électoral et que toutes ses décisions pour le reste du processus, ne puissent souffrir d’aucune ambigüité juridique. Il faut le rappeler les juges constitutionnels qui ont pourtant des pouvoirs importants, ne sont pas élus. On peut néanmoins admettre qu’ils sont démocratiquement autorisés à exercer les pouvoirs que leur donne la Constitution en vertu du fait que les citoyens adhèrent à celle-ci, même si ce consentement est implicite.
Mais aussi que tous les acteurs acceptent le fair play après avoir épuisé tous les éventuels contentieux électoraux.
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Que la campagne électorale se fasse à travers la non-violence et qu’un véritable débat programmatique s’installe au détriment des invectives et attaques personnelles.
Dans une perspective de période postélectorale il nous faut une innovation démocratique qui traduise une volonté de mettre la participation directe des citoyens au cœur de l’élaboration des politiques, de dépasser ainsi les insuffisances de la démocratie électorale.
Ainsi la présence de partis politiques est essentielle au déploiement des vertus de l’élection en tenant en compte :

  • Le consentement des citoyens à être gouvernés ;
  • L’inclusion égalitaire des citoyens dans le processus de décision ;
  • Le contrôle et la contestation des décisions et des décideurs par les citoyens ;
  • Les qualités épistémiques du processus de décision.
    Il nous faut une transition pour une refondation nationale basée sur des consensus forts comme
    les conclusions des Assises Nationales et celles de la CNRI.
    Enfin une procédure de vote est démocratique si elle est inclusive c’est à dire : si elle assure à tous les citoyens, quelle que soit leur origine sociale, une possibilité égale de prendre part, directement ou indirectement, à la formation de la décision politique.
    DENIS NDOUR
    Human Rights specialist denisnddour@gmail.com