Fadel Dia, « La nouvelle pandémie », Sud Quotidien, 12 juillet 2025.
Version en ligne : https://www.sudquotidien.sn/la-nouvelle-pandemie-par-fadel-dia/
Senegal
Sénégal
Extraits
« Ce nouveau fléau n’est pas un fléau inconnu. Je ne connais pas son nom scientifique, mais il était apparu il y a quelques décennies, sous celui de fascisme. Sa zone d’expansion est plus vaste aujourd’hui et on préfère le désigner sous les doux euphémismes d’extrémisme de droite, de populisme ou « d’illibéralisme ».
Les virus qu’il véhicule eux, n’ont pas changé, ils s’appellent nationalisme exacerbé, rejet des institutions démocratiques, contrôle ou censure des médias, rejet de l’autre, mépris des pauvres, exclusion, intolérance, violation du droit international, invocation d’une imaginaire complicité judéo-chrétienne et négation de l’héritage du Siècle des Lumières. Il honnit l’islam, considère que l’immigration est la grande calamité du siècle et la cause de tous les maux, qu’il ne suffit pas de l’éteindre, mais qu’il faut procéder à l’expulsion massive des immigrés et au démantèlement du droit d’asile. Sa priorité, c’est de construire des murs, des remparts de pierres et de feu ou des barrières douanières qui vont transformer le monde en un parcours du combattant. »
« On peut désormais dire de la démocratie ce que Paul Valéry avait dit de l’Europe après les désastres de la Grande Guerre : sa mort est devenue concevable ! Cette mort serait une désillusion, car elle aurait été précipitée par le pays sur lequel on comptait le plus pour la préserver, à la fois en raison de son histoire, de la solidité de ses institutions, de son poids politique, économique et intellectuel, et de sa diversité religieuse et ethnique.
Pour nous, Africains, cette mort serait une catastrophe, car la démocratie serait passée sans que nous l’ayons vraiment pratiquée. Nous en sommes encore à regretter les pères fondateurs de nos pays, qui n’étaient pourtant pas des modèles de démocrates. Une douzaine de nos pays sont dirigés par des militaires ou d’anciens militaires qui ont accédé pour la première fois au pouvoir par les armes, une demi-douzaine de nos chefs d’État ont 80 ans ou plus et sont, pour certains, à la tête de leurs pays depuis 40 ans ou plus, et aucun d’entre eux n’est prêt à renoncer au pouvoir. Enfin, pour balayer devant notre porte, après deux alternances, les Sénégalais continuent encore à manifester pour réclamer la préservation du droit d’expression !
Voilà pourquoi nous ne pouvons pas cacher notre tristesse lorsque le chef d’un parti qui a déjoué tous les pronostics et fait la démonstration que le vrai pouvoir appartient au peuple dit, en substance, que la démocratie est une illusion et un piège, que « les pays qui ont décollé ces dernières années » s’en sont bien passée, que « ce n’est pas parce qu’on est arrivé au pouvoir de manière démocratique qu’on n’est pas un révolutionnaire ! ». »
Bonsoir lecture.
Coumba